Je m'appelle Chloé, j'ai 29 ans et j'habite en Normandie où le mauvais temps n'est pas une légende. J'exerce aujourd'hui un métier qui n'a rien à voir de près ou de loin avec la création artistique mais je dessine et peins dès que j'en ai l'occasion. J'aimerais pouvoir vivre de cette passion - au moins partiellement - en la transformant progressivement en activité professionnelle. Quand je n'ai pas envie de dessiner, les livres occupent le reste de mon temps.
As-tu toujours voulu être illustratrice ? Quelles études as-tu suivi ?
Quand j'étais adolescente, je dessinais et peignais déjà beaucoup, faisais du théâtre et cultivais une fascination pour les films d'animation. Je me rêvais dans différentes carrières artistiques, l'illustration était une option parmi d'autres. Mais la précarité des métiers artistiques me faisait très peur : à 18 ans, j'étais très anxieuse et je voulais absolument assurer mon autonomie financière. Je me suis donc tournée vers un projet « plus sage », en lien avec mon amour des livres : l'enseignement.J'ai suivi un cursus universitaire en filière lettres modernes jusqu'à l'obtention du CAPES (concours de l'enseignement secondaire) ; des années d'études très enrichissantes que je ne regrette absolument pas, mais pendant lesquelles les livres ont pris plus de place que le dessin. J'ai enseigné deux ans et, pour diverses raisons, ai abandonné le métier. C'est durant cette période post-prof que j'ai renoué avec le dessin et mes rêves de carrière artistique. Je me suis remise intensivement au dessin et à la peinture, avec le soutien de mon entourage, et j'ai commencé à publier mes créations sur Internet. A force de pratique, je sais aujourd'hui que l'illustration me fait tout particulièrement vibrer. N'étant pas dans une situation me permettant de tenter l'aventure d'illustratrice en freelance, j'ai entrepris une reconversion professionnelle vers un métier qui me convient mieux que le professorat, tout en espérant pouvoir développer en parallèle une activité artistique.
Comment travailles-tu ? Quelles sont tes techniques de prédilection ?
Je dessine régulièrement dans des carnets, sans chercher à y faire des dessins très travaillés ou réfléchis. Je m'y amuse et teste des idées. Mes illustrations naissent souvent de croquis repris de ces carnets.Pour mes illustrations plus abouties, j'accorde une grande importance au choix de la palette de couleurs, aussi, je commence toujours par réaliser des vignettes pour tester différentes associations et choisir celle qui me plaît le plus. Ensuite, je choisis avec quels produits j'ai envie de travailler : cela dépend de mon envie sur le moment. Je n'ai pas UN outil de prédilection, cela me plaît de travailler différemment, selon le produit utilisé. Je peins et dessine régulièrement à l'aquarelle, à la gouache, au crayon de couleur ou encore au pastel. J'adore d'ailleurs mélanger ces médias, cela permet d’apporter des effets de texture que je trouve intéressants. J'ai une affection toute particulière pour l'association aquarelle et crayons de couleur.
Concernant mon matériel, j'utilise des aquarelles White Nights et Daniel Smith, deux gammes de peinture très pigmentée, avec des pinceaux synthétiques ; côté crayons de couleur, j'adore les Polychromos de Faber-Castell et les quelques Coloursoft de Derwent que je possède. J'utilise aussi la gouache Linel et les pastels Neocolor II de Caran d'Ache.
Préfères-tu le digital ou le traditionnel ?
Réponse facile pour moi car je ne fais que du traditionnel : mon cœur penche naturellement vers le papier, les tambouilles et les tâches de peinture sur les mains et le bureau. Non pas que le dessin numérique ne m'intéresse pas mais j'ai toujours privilégié l'achat de matériel d'art traditionnel plutôt que d'investir dans une tablette graphique jusqu'ici. J'aime le rendu du dessin sur papier et « le contact » avec les différents outils. Si je veux me spécialiser en illustration, je sais qu'il me faudra en passer par le numérique, au moins en partie. Je suis certaine que ce sera très excitant à découvrir et que cela enrichira ma pratique traditionnelle, mais mes aquarelles et mes crayons sont vraiment des outils que j'adore avoir en main.Où trouves-tu ton inspiration et quelles sont tes influences principales dans ton travail ?
Mes premières inspirations étaient Disney et Tim Burton. Les yeux énormes de mes personnages sont clairement des indices de cet héritage.Aujourd'hui, j'ai la sensation d'être beaucoup inspirée par ce que je lis - avec ou sans images - et ce que je regarde. Les univers fantastiques ou de fantasy font souvent jaillir des idées de personnages ou, du moins, me donnent souvent envie de dessiner. Je me sens fortement marquée par les contes, les légendes et les mythes. Je m'inspire finalement moins de ce que j'observe dans ma réalité que de ce que j'imagine et de ce que les fictions me font imaginer.
Je m'abreuve aussi quotidiennement d'images : je suis des centaines d'artistes sur mes réseaux sociaux et découvre de nouvelles illustrations chaque jour. J'identifie de nombreux artistes comme des sources d'influence évidentes, parmi elles et eux : Nuria Tamarit, Stéphane Fert, Marie Boiseau, Justine Cunha, Christina Bauer, Aurélien Galvan et tant d'autres ! Avec le temps, j'ai la sensation que mon style graphique est un gros mélange, plus ou moins bien digéré, de toutes ces influences.
Que préfères-tu dessiner ?
J'adore dessiner des nanas et des animaux, je ne fais quasiment que ça d'ailleurs. Ça m'éclate vraiment de jouer avec l'anatomie - sans en être pourtant une experte - et d'exagérer les silhouettes et les courbes de mes sujets. Je voudrais tout de même vraiment apprendre à réaliser des décors, même simples, pour créer des ambiances plus convaincantes.De quelle illustration es-tu la plus fière ?
Je suis contente de chaque nouvelle illustration avec laquelle j'ai la sensation d'avoir progressé, compris ou découvert quelque chose. Sur un plan plus esthétique et technique, je suis vraiment fière d'une petite série réalisée à la gouache qui représente des femmes nues dans des postures plus ou moins tordues. Ma préférée est une femme bleue sur fond jaune. Avec ces illustrations, j'ai eu la sensation d'un déclic quant à la façon dont j'aime représenter mes personnages féminins. Je n'ai plus peur de jouer avec leur anatomie depuis.D'un autre point de vue, je suis aussi fière de réaliser des illustrations engagées pour la cause animale. La dernière en date - "Gavons-les d'amour" - représente un canard nourri avec un cœur par une main humaine et je la trouve vraiment douce et positive. C'est ce que je voulais.
Quelle est ta journée type d’illustratrice ?
N'étant pas professionnelle et n'ayant aucune obligation de dessiner en dehors de celle que je m'invente et m'impose, je n'ai évidemment pas de journée type d'illustratrice. Cela va faire un an que je m'oblige à dessiner chaque jour, même seulement un petit croquis sur un coin de feuille en deux minutes.Depuis que j'ai repris une activité professionnelle à plein temps, cela me demande beaucoup d'organisation pour parvenir à rester productive et régulière. Mon carnet de dessin est très bon allié. Avec lui, j'exploite au mieux mes temps libres : je l'emmène à l'extérieur, au bureau, le remplis également le soir avant de me coucher quand je ne suis pas trop fatiguée. Je mets particulièrement à profit le temps dont je dispose les week-ends pour m'atteler à des projets de dessin un peu plus longs à réaliser. Avec cette organisation, je produis moins d'illustrations abouties (une seule par semaine en général) mais je pratique toujours quasi-quotidiennement et c'est l'essentiel à mon sens pour rester motivée et inspirée.
Des futurs projets à venir ? (livre, expo, nouveaux produits …)
Mon projet personnel principal est de continuer à progresser et rester créative et productive sur le long terme, malgré mon activité professionnelle principale. Je veux également m'atteler à la création de mon premier portfolio, saisir une ou plusieurs nouvelles occasions d'exposer et, bientôt je l'espère, ouvrir une boutique en ligne et proposer à la vente mes dessins pour la première fois.Parallèlement, je travaille à la création d'un collectif artistique avec des membres de l'association L214 afin de produire et diffuser des œuvres représentant des rapports apaisés entre humains et animaux. Le projet n'en est qu'à ses tout premiers pas, son avenir est encore incertain, mais j'espère sincèrement qu'il se concrétisera.
Vous pouvez retrouver le travail de Chloé sur son Instagram.
Les outils de Chloé :
- Les Polychromos de Faber Castell- Les pastels Neocolor II de Caran d'Ache
- L'aquarelle Daniel Smith
- La gouache Linel
Rendez-vous chaque samedi pour une nouvelle interview. Prochaine interview le samedi 31 août avec Laura. N'hésitez pas à réagir en commentaire pour m'indiquer quelle illustratrice voulez-vous voir sur mon blog.
©Lucile Farroni - 2019
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